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 am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)

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Ishikawa Ryuku
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MessageSujet: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:43

Mes oreilles s’agitèrent et je m’arrêtai à la lisière de la forêt, m’asseyant et laissant ma queue s’enrouler autour de mes pattes dans un mouvement harmonieux. Je restai en retrait derrière les arbres, ravi de pouvoir profiter de la douce température que le toit sylvestre conservait si bien. Je me grattai le cou avec agilité avant de me relever et de plisser mon regard ambré. Les nuits devenaient plus longues en ces premiers jours d’automne et voir la courbe de l’horizon rougeoyer légèrement me soulagea, même si le soleil était loin d’être véritablement de retour. L’aube déteignait sur le ciel avec une poésie toute particulière, enrobant les étoiles de nuages vermeilles jusqu’à les engloutir pour de bon. J’attendis ainsi de longues minutes, puis m’impatientai et fis demi-tour pour courir dans les bois. Un plaisir simple et quotidien, puisqu’il ne me restait plus que ça. Mes souvenirs les plus chaleureux me paraissaient tous gâchés par une réalité que je ne parvenais pas à accepter, pas totalement. Cela faisait plusieurs nuits que je passais à méditer sans parvenir à trouver le sommeil, une voix venue d’outre-tombe me répétant sans relâche les modifications apportées au règlement de Poudlard. Thalia Selwyn m’avait raconté les faits, je n’avais plus qu’à imaginer le reste : les images du train s’arrêtant au milieu de son trajet pour en faire sortir tous les impurs avaient fait le tour de tous les journaux et je gardais un exemplaire du Daily Protest dans mon manteau pour me rappeler que tout était vrai si l’idée de disparaître à nouveau pour ainsi me dédouaner de toutes mes responsabilités traversait mon esprit. Je ne leur devais rien, individuellement. Mais je devais tout à l’ensemble de ces élèves nés-moldus que l’on privait d’éducation. J’avais eu ma dose de mauvaises surprises durant mon existence, néanmoins jamais on ne m’aurait refusé une place à l’école sous prétexte que je n’étais pas né dans la bonne famille. Ils allaient ainsi laisser des sorciers inexpérimentés seuls, cassant leur boussole en plein désert. Etaient-ils simplement conscients du danger que tout le monde courait en n’aidant pas de jeunes élèves à maitriser leur magie correctement ? Un né-moldu était, selon eux, moins puissant qu’un sang-pur mais ils ne pouvaient nier l’évidence du fait que les deux étaient capables de jeter des sorts, et que les deux avaient besoin de guides dans un monde tel que le nôtre. Les mots de Thalia ne cessaient de parcourir les parois de mon crâne pour y semer leurs graines d’angoisse et de désarrois : on avait utilisé le sortilège Doloris contre certains de ses camarades car c’était la nouvelle règle pour discipliner les rangs de Poudlard. Mon sang ne fit qu’un tour en repensant à cela et je griffai violemment le sol, regrettant de ne pas avoir eu une proie à achever entre mes pattes de prédateur courroucé.
Je le savais pertinemment : je ne pouvais plus échapper à ce destin que l’on semblait avoir tracé pour moi et qui avait paru évident à tous ceux qui m’entouraient. J’allais rejoindre la Résistance pour lutter contre le gouvernement et renverser Amos Rosier, la marionnette de Voldemort. Les voix qui m’avaient tant répété que je n’étais qu’un lâche couplé d’un camé s’étaient tues en entendant les battements saccadés de mon cœur, animé non pas par la tristesse, le courage ou l’espoir, mais par la colère la plus brute qui soit, taillée au fond de mes entrailles par un artisan démoniaque. Rien de bon ne naissait de la colère mais si Romy voulait me voir dans ses rangs, elle ferait avec. Ce n’était pas faute de l’avoir prévenue. Voilà l’inconvénient de rencontrer une personne qui avait vu la bonté que j’avais en moi : elle finissait par ne voir que ça et j’avais besoin d’une piqûre de rappel. J’avais besoin d’être certain de mes convictions, de savoir pourquoi j’allais enfin accepter de participer à cette révolution qui n’était même plus la mienne depuis longtemps. Probablement parce qu’à chaque instant depuis que j’avais appris ce qu’il se tramait à Poudlard, je revivais les sensations que provoquaient le sortilège Doloris sans même parvenir à les décrire tant elles étaient intenses, à la fois pour l’auteur du sort et pour celui qui le subissait. J’avais été l’un et l’autre. Le lancer était une jouissance maladive et bestiale, tangente à la folie car la formule et l’éclair jaillissant d’une baguette pour s’écraser de plein fouet sur l’adversaire constituaient une image qui définissait cette haine d’habitude ineffable que l’on éprouvait pour ses ennemis jurés. Un Doloris s’exprimait comme aucun autre sortilège n’était capable de le faire. Et il fallait de la nonchalance, de la désinvolture face à la violence, il fallait le vouloir comme l’héroïnomane que j’avais été désirait son fix, toujours plus car on s’accoutumait vite à ce que cela nous faisait. Il fallait nettoyer son esprit d’une quelconque forme d’empathie ou de regret, un point de non-retour tel un homme vendant son âme au Diable pour garder la jeunesse éternelle. Je souris à cette référence.
Non, lui ne serait pas capable de lancer un Doloris.
Puis venait la victime qui perdait subitement la raison. J’avais vu des hommes se jeter dans le vide pour échapper à la douleur car l’auteur du sortilège faisait durer l’effet trop longtemps. En France, les mafieux ne rechignaient pas quand à son utilisation et j’en avais croisé des vicieux. Je m’y étais assez confronté pour goûter moi-même au sortilège à plusieurs reprises et je pouvais comprendre les suicides soudains. Imaginez : disséqués vivants, on remplace votre sang par de l’acide et on vous laisse mourir crucifié en plein soleil, pâture pour les corbeaux. On arrache vos poils et vos ongles, on vous brûle la peau sans vous incinérer, si bien que vous avez conscience de la douleur et que vous pouvez voir dans votre esprit votre corps se décomposer, mais il reste pourtant intact, secoué par d’incessants soubresauts que rien ne peut calmer. Et vous pleurez jusqu’à ce que vos yeux s’assèchent de désespoir, mais eux non plus ne fondent pas et, malgré vos prières, le cauchemar continue. Enoncé ainsi, je fus à la fois répugné et fasciné par le sortilège, sentant la haine prendre le relais de la colère en repensant à l’identité de ceux qui l’avaient subi de ma main. Ils n’étaient pas nombreux, mais bien assez pour compter, marqués dans mon cœur comme les trous de mes avant-bras : béants, lugubres, significatifs. Une brusque poussée d’adrénaline me fit accélérer le pas et je sortis des sentiers pour me plonger dans la forêt profonde, ignorant le soleil qui ne tarderait plus à enflammer l’horizon que j’avais abandonné derrière moi, ne lui adressant qu’un soupir avant de préférer l’obscurité des chênes massifs à l’aube renaissante.
Mon flair me conduisit là où je désirais me rendre. C’était devenu un jeu d’enfant que de retrouver la trace de Leviathan au milieu des bois le matin suivant la pleine lune. Je croisais son itinéraire, tentais de comprendre dans quel sens il se rendait et, une fois chose faite, j’allais dans la direction opposée afin de l’attendre là où il s’était transformé. Généralement il y retournait lorsque la lune s’endormait afin de récupérer ses vêtements qu’il prenait soin d’enlever avant – il n’allait pas gâcher ses costumes sur mesure, lui qui s’amusait à me rappeler dès qu’il en avait l’occasion que chaque tissu valait probablement ma vie et celle de ma mère réunies. Je ne réagissais même plus à ses piques acerbes car, même si elles s’avéraient être sincères – ce dont je doutais malgré tout – elles avaient perdu leur don de m’agacer. Je m’y étais habitué et j’y répondais de mieux en mieux, ce qui irritait parfois Levi d’une façon que j’appréciais tout particulièrement. Je grimpai sur un rocher, mon museau rasant le sol à la poursuite de son odeur que je ne tardai pas à repérer, ce qui me permit de remonter jusqu’à, en effet, un tas de vêtements entre deux sycomores à l’allure mystérieuse. Reprenant forme humaine, j’attendis, et les minutes passèrent afin de former une heure entière, assez pour que les couleurs pastels de la voûte céleste traversent les branchages et viennent caresser la peau de mon visage, éclairant mon air taciturne avec douceur. Le petit matin était arrivé, apportant avec lui l’odeur de la rosée, légère et aqueuse, dans laquelle je retrouvais étrangement le parfum du miel. Celui de la résine des arbres qui m’entouraient m’envoûta également et je poussai un soupir las mais plus placide que les émotions qui m’avaient animé durant la nuit entière. J’avais besoin de parler à Leviathan. De lui faire part de ma décision, même si je connaissais déjà sa réponse. Je voulais qu’il prenne conscience que le monde ne tournait pas autour de lui et que cela n’avait jamais été le cas. Même si je savais que mes paroles seraient inutiles, l’envie d’en avoir le cœur net ne m’avait pas lâché et j’avais attendu chaque jour me séparant de la pleine lune, date butoir que je m’étais imposé, avec une excitation mêlée de fatalité car j’avais imaginé mille fois la lueur de déception et de dédain qu’il m’accorderait en apprenant que je rejoignais la Résistance, et j’avais écrit mille réponses dans un coin de mon esprit pour tenter de mettre des mots sur ce que je ressentais, en vain. J’étais naïf mais Levi comptait pour moi et je cherchais à ce que cette affection soit moins difficile à éprouver, simplement pour me prouver que je pouvais ressentir de beaux sentiments au même titre qu’un autre être humain afin d’en devenir semblable.
Je m’adossai à un vieux châtaigner et allumai une cigarette d’un geste lent, typique de mon comportement asthénique lié au manque. J’avais repéré d’un coup d’œil attentif la silhouette qui s’approchait de là où je me situais et ne cherchai pas à me cacher. Finalement, Leviathan se posta devant moi, les cheveux ébouriffés et la peau luisante de sueur. Sa respiration était calme mais son regard toujours vif, identique à celui des animaux sauvages que je croisais lorsque de mes escapades champêtres. Je recrachai un nuage de fumée, rajustant avec ironie mes lunettes sur mon nez pour détailler de haut en bas son corps nu qu’il montrait sans honte, ne faisant qu’un avec son environnement. « Alors, ça fait quoi de dépasser le mètre soixante-dix ? » l’interrogeai-je, un sourire narquois sur les lèvres. Il ne tarderait pas à renchérir, je préférais attaquer le premier. Il avait très bonne mine et, paradoxalement, son visage était creusé par l’épuisement lorsque la lumière du jour passait entre les branchages pour se refléter sur ses pommettes. Son esprit vieillissant le rattrapait lorsqu’il retournait à l’état d’homme, conscient qu’il y avait un prix à payer pour tout. Je lui désignai ses vêtements d’un signe de la main puis croisai les bras, scrutant les moindres détails de sa silhouette pour constater les traces de sa renaissance nocturne. Avait-il vendu son âme au Diable pour garder la jeunesse éternelle ? Leviathan y avait sûrement songé maintes fois mais qu’en aurait-il été de son désir de mourir jeune en héros incompris, mythe grec et farandole littéraire ? Non, lui ne serait pas capable de lancer un Doloris. On pouvait trouver bien des expressions dans le regard de Leviathan, mais la haine s’était estompée au profit d’une éternelle indifférence qui n’était pas suffisante pour que je me détache de lui. Parce que je savais qu’il y avait autre chose. Je voulais voir de la bonté en lui, au risque d’oublier l’abîme dans lequel était tombée sa compassion, à l’image d’un immortel ayant perdu le goût de vivre à force d’exister dans un monde où il n’avait jamais trouvé sa place véritable.
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Ishikawa Ryuku
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MessageSujet: Re: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:44

Il courait sans un bruit, au couvert de la nuit par les arbres qui se dressaient au dessus de sa tête. Il avait laissé tomber son enveloppe humaine depuis des heures, laissant derrière lui des habits dont il n’avait plus besoin. Son corps était recouvert de longs poils gris, qui attrapaient la lumière de la lune et la gardait, seul élément capable de l’identifier comme l’humain égoïste qu’il était alors que la lune n’était pas pleine.
Mais il n’était pas humain; il était animal.
Dans chaque pas, dans chaque hurlement, dans chaque mouvement de la tête afin de sentir l’air qui l’entourait. Il était le monstre des légendes, celui qui se parait d’une nouvelle forme une fois par mois. Il était de ceux qui se transformaient pour devenir animal. Et surtout, il était de ceux qui se réjouissait de chaque minute passée dans un corps qui lui semblait plus vrai que l’autre.
Ses pattes battaient le sol d’une cadence naturelle, et ses griffes s’enfonçaient dans une terre qui lui parlait, lui murmurait les symphonies de la nature. Ce son était si beau qu’il se laissait bercé, qu’il fermait les yeux pour laisser ses sens en harmonie avec l’environnement. Il ne faisait qu’un avec la nature, il était membre à part entière du cycle prédateur-proie. Il goutait le sang d’un blaireau dans sa bouche, le gout de métal rouillé au fond de sa gorge. Lorsqu’il s’était nourri pendant les premières transformations, le gout l’avait horrifié. Il n’avait pu s’en débarrasser même après avoir repris cette forme de bipède, car chaque transformation lui lassait un gout de sang entre ses dents. Puis, il avait fini par apprécier cette sensation que la traque, comme s’il laissait toute partie humaine en dehors pour se retrouver lui-même, loup. Une partie de son esprit lui sifflait qu’il était pourtant un humain, qu’il avait un nom, qu’il gardait une conscience trop développée pour un loup tout simplement parce qu’il n’en était pas un. Une autre part, celle qui déclarait son amour à une lune ronde, lui proposait de garder cette conscience qui le gardait maître de ses actes en contrepartie de se glisser entièrement dans une peau qui devenait de plus en plus la sienne à chaque cycle lunaire.
Il se pliait volontiers à cette faim insatiable qui dictait ses actions car ce n’était pas si différent de sa façon de vivre en tant qu’humain. Et cette faim réconfortait les deux voix, les mêlait en une seule qui chantait. Tu es le même, dans n’importe quelle forme. La seule différence résidait en son corps, car celui de loup était imposant, au contraire de la carrure réduite d’un humain qui montrait les signes d’un âge assez avancé. Le loup était le même à chaque nuit comme si le temps glissait sur sa fourrure comme les rayons de la lune. Il était l’animal qui parcourait la forêt, roi de cette terre sans jamais avoir besoin de le clamer haut et fort. Et lorsqu’il s’arrêta, à l’affut, il n’y avait aucune hésitation dans ses yeux lorsqu’il sauta sur sa proie. Ses crocs se resserrèrent sur le coup d’un cerf, ses mâchoires puissantes cherchant sa répit les os de l’animal pour lui donner rapidement la mort. Lorsque le cerf tomba par terre, ses derniers mouvements tronqués par une mort soudaine, le loup leva les yeux vers le ciel qui devenait de plus en plus clair. Sa traque avait eu des élans de désespoir, alors qu’il sentait les minutes déroulées le long de la rivière, lui laissant que trop peu de temps dans cette forme qu’il aimait tant. Ses crocs arrachèrent la peau de la cuisse de cerf. Il avait passé ce dégout de la viande cru, car c’était ainsi qu’il mangeait lorsque la lune s’arrondissait, et le gout du sang dans sa gorge était devenu un nouveau compagnon dont il ne cherchait pas à se débarrasser. Ses mâchoires réduisirent en état de bouillie les muscles puissants de sa proie, et le loup déglutit, se dépêchant de prendre son dernier repas avant de retrouver une forme faible et maudite.
Lorsque son repas fut fini, il se nettoya avec un soin qui l’étonnait encore. Il ne s’aimait pas particulièrement. Son caractère tout entier se basait sur une arrogance qui lui permettait de cacher ce qu’il souhaitait. Mais dans cet acte naturel, il prenait soin de lui pour la première fois, dans un geste d’affection qu’il ne comprenait pas encore. Puis, il prit la direction de la bordure de la forêt, guidé par un sens olfactif qui lui permettait de reconnaitre sa propre odeur humaine. Pourtant, à quelques minutes de l’endroit où il avait déposé ses vêtements, un coup de vent lui apporta une autre odeur, une qu’il reconnaissait que trop bien. Alors il s’arrêta, décidant d’attendre la transformation ici, même s’il savait que le retour à la bordure serait difficile. Le loup était fier, et n’avait aucune envie que l’autre assiste à une scène d’une telle vulnérabilité.
Il attendit que la lune ne se couche, et le temps lui semblait si long qu’il enfouit ses crocs dans la terre légèrement trempée par les embrumes de la tombée du jour. Puis, la lune se cacha, et un grognement s’extirpa de sa gorge tandis que ses os commencèrent leur lente transformation. Comme toujours, les changements débutèrent au niveau du torse et le loup tomba à terre alors que son souffle le quitta, sa cage thoracique se refermant sur des poumons qui prenaient encore trop de place. Il gémis lorsque son torse ne put soulever le poids de sa tête. Il ferma les yeux sous la douleur des os de son crâne qui se réarrangeaient, fusionnant avec d’autres pour lui retirer le museau, pour centrer le foramen magnum afin de laisser passer sa moelle et la vertèbre atlas. Garder une conscience humaine avait un appris: avoir conscience de chaque déplacement d’os, de chaque souffrance occasionnée. Il enterra sa bouche dans la terre pour cacher ses cris lorsque ses épaules s’alignèrent dans son dos et que son bassin bascula pour permettre une marche qu’il avait presque oublié. Ses griffes rentrèrent dans ses doigts et la douleur le fit enfouir ses doigts dans son torse, sentant la peau au lieu d’une fourrure chaude.
Leviathan tremblait encore de douleur lorsqu’il ouvrit les yeux et il se demanda quand il les avait fermé. Il avait sûrement du perdre connaissance, et alors que la douleur battait encore son chemin dans ses membres, il ne prit même pas le temps de se trouver faible. Il attendit encore quelques minutes pour reprendre un souffle normal - mais était-ce normal ce souffle humain? Où était sa respiration de loup, bien plus facile, bien plus régulière?
Il se releva, s’aidant d’un arbre à côté de lui, se cramponnant à l’écorce. Son corps ne portait aucune nouvelle cicatrice, et cela ne l’étonnait guère. Lorsqu’il perdait son esprit à un animal - qu’il se réveillait le lendemain sans aucun souvenir - il était blessé. Mais lorsqu’il gardait sa conscience humaine, il blessait les autres, en une sorte d’ironie morbide qui lui pliait le ventre.
Leviathan commença à marcher vers ses habits et Eachan, dans son apparat de naissance, le vent lui claquant le visage. Mais son corps vibrait encore sous la douleur de la transformation et il n’avait que faire du froid, pas quand sa démarche était encore hésitante. Il prenait trop rapidement l’habitude de se déplacer à quatre patte, et son centre de gravité n’était pas encore recentré, et Leviathan trébuchait à chaque nouveau pas. Son esprit hésitait encore sur comment se définir, pris au piège d’un épais brouillard. Comme à chaque transformation, il ne savait plus dans quel état il se trouvait; homme ou animal. Il était Leviathan Mingan Faust dans les deux cas, mais il ignorait s’il était actuellement le monstre ou le loup gris. Sa proprioception lui envoyait des signaux qu’il ne pouvait pas ignorer, et la présence de deux pouces opposables lui en apprenait plus que ce que son propre esprit lui criait. Mais sa marche de bipède résonnait creux en lui, et il ne pouvait se détourner des images de la forêt et des odeurs. Il laissait une partie de lui dans chaque pas qu’il faisait vers les habits qui représentaient son retour à l’humanité.
Et pour cela, il n’avait aucune envie de voir Eachan. Ce moment était un instant de véritable vulnérabilité qu’il n’avait pas envie d’offrir à un homme qui le connaissait trop, qui était capable de saisir chaque nuance de cette faiblesse pour l’utiliser en arme. Il ne voulait pas donner une autre raison à Eachan d’avoir un poids sur lui.
Il entra dans la clairière, le nez froncé par l’odeur de cigarette qui tranchait trop et douloureusement par rapport à l’air clair de la forêt, et l’espace d’un moment, il détesta cette marque de l’homme en face de lui. Encore une fois l’homme amenait son poison au sein de la nature, détruisant le peu de douceur dans ce monde. Mais Eachan avait sa drogue et Leviathan la sienne. La plus belle, la plus douce des drogues, qui coulait dans ses veines et artères en une malédiction à vie, qui le torturait physiquement pour l’apaiser mentalement. Ils n’étaient pas si différent en réalité, malgré tout ce que disait Leviathan.
Lorsque le regard d’Eachan se posa sans honte sur lui, Leviathan ne trouva même pas la force d’étirer ses lèvres en un sourire satisfait. Son corps lui semblait encore trop étranger pour éprouver une fierté à une telle contemplation. Il rêvait d’un corps plus trapu, couvert par une épaisse fourrure grise, ne faisant qu’un avec l’environnement. Il avait l’impression d’être une entité hybride, qui n’avait pas sa place entre les arbres. « Alors, ça fait quoi de dépasser le mètre soixante-dix ? » Le visage de l’américain le changea pas, encore pris dans une transe qui touchait son organisme entier, prix d’une transformation douloureuse mais cathartique. « Je te dirais ça une fois que j’aurais appris à me dresser sur mes pattes arrières. On pourra jouer à la balle si tu veux, ça pourra sûrement te stimuler intellectuellement. » Eachan lui indiqua ses vêtements et Leviathan se demanda l’intérêt de ce geste. L’écossais en avait-il assez de la vision de son corps d’homme nu? Lui donnait-il le droit de s’habiller ou s’appropriait-il le droit de retourner Leviathan à sa condition d’homme? Un loup parcourait le monde nu, mais Leviathan n’en était pas un. Il était un loup garou, un de ces monstres des légendes, un wendigo des histoires maternelles. Leviathan enfila ses habits un par un, dans un mouvement rapide mais aucunement assuré. A chaque pièce le couvrant, il reprenait conscience de son rôle dans l’humanité cruelle, et il n’avait aucune envie de retourner à sa vie normale. Lorsqu’il toucha sa baguette, un courant de magie le traversa, éloignant le brouillard, lui rendant la sensation d’être un sorcier et non plus une bête. Il se tourna alors vers Eachan, qui lui aussi possédait une partie animale, sûrement trop présente pour un simple animagus. Leviathan semblait si humain sans la sauvagerie de son regard, et il se demandait de quelle couleur était ses yeux, s’ils avaient conservé leur nuance ambrée. Il avala sa salive, la laissant glisser dans sa gorge pour emporter avec elle le gout du sang, seul indice de ses activités nocturnes. « Je te manquais tellement que tu devais venir me chercher en plein coeur de la forêt? Adorable. »
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MessageSujet: Re: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:45

Je fronçai légèrement les sourcils, faisant retomber la cendre du bout de ma cigarette sur le sol d’un coup de pouce. Leviathan ne sourit pas : son visage m’apparaissait à travers la brume du matin qui dormait encore tel celui d’un fantôme. La lueur folle de son regard contrastait avec l’épuisement qui semblait s’être abattu sur lui. Je le savais différent. Je sentais les parfums qui se mêlaient à son odeur naturelle et ils étaient loin de ce que le sorcier était d’habitude, au quotidien. Il sentait la terre labourée par une course effrénée, l’eau claire des rivières, la fraîcheur lunaire de la nuit et, indéniablement, le sang de ses proies. Ce dernier effluve était celui qui recouvrait tous les autres, à mes narines affûtées en tout cas, puisque j’avais été animal avant lui, donc prédateur avant lui. J’en reconnaissais les nuances olfactives et mon flair reconstituait dans mon esprit tout ce que le sang m’évoquait, ne s’arrêtant pas à une simple senteur de rouille. Je salivai étrangement, me rappelant la texture singulière et parfois si visqueuse du liquide pourpre coulant des plaies que l’on infligeait lors de nos traques, mais si je me contentais de poules ou d’écureuils, parfois d’insectes et même de fruits en été, Leviathan, lui, chassait un gibier plus gros. Je redoutais l’arrivée de l’hiver. La saison froide m’avait traumatisée lors de mon exil puisque, les premiers mois, j’avais failli mourir de faim, constatant que l’absence de nourriture amenait mes semblables à manger des charognes. J’avais été contraint de devenir nécrophage et de m’adapter à mon environnement mais cela m’avait la plupart du temps rendu malade, si bien que certaines odeurs de mort me donnaient facilement la nausée, encore aujourd’hui. Au fil des années, je m’étais habitué à la chair morte, comprenant que je n’avais pas de solution, mais j’avais connu des hivers rudes auxquels je n’avais pas été certain de survivre et lorsque les températures baissaient, je paniquais, surtout depuis que j’avais pleinement repris une conscience humaine. « Je te dirai ça une fois que j’aurai appris à me dresser sur mes pattes arrières. On pourra jouer à la balle si tu veux, ça pourra sûrement te stimuler intellectuellement. » Je levai les yeux au ciel, comprenant que l’américain n’était pas de bonne humeur. Et je connaissais assez Leviathan pour savoir qu’il ne rendrait pas ma tâche facile. Il avait manifestement pris goût à l’air sylvestre et à ses transformations alors que, d’habitude, les loups garous se trouvaient monstrueux. Je lisais clair dans son air renfrogné et son visage fatigué : il ne supportait plus son corps humain. Je ne m’identifiais que trop bien à ce sentiment que nous partagions malgré ce qu’il pensait de moi, mais cela aurait été miraculeux de lui faire admettre : non, Leviathan était unique, il vivait des sensations qui lui étaient propres et il me détestait de venir l’interrompre dans ce qui faisait encore partie du processus de transformation. Cela me faisait rire, au fond de moi, puisque jamais de ma vie je n’avais rencontré plus humain que lui. Plus humain que celui qui collectait les défauts de l’humanité jusqu’à la détester. Mais on n’échappait pas à sa nature et il lui faudrait un jour reconnaître qu’il était humain après tout. Il était né humain et allait mourir humain, pour son plus grand malheur. « Tu as l’air de mauvais poil. » grognai-je d’une voix railleuse, ne pouvant me lasser de cette plaisanterie car elle jouait de sa prévisibilité.
Leviathan enfila ses vêtements et je terminai ma cigarette, l’écrasant sur le sol après avoir soufflé dans l’air matinal le dernier nuage de fumée, écrasant le filtre du bout de ma chaussure. Je l’observai faire : il mettait ses habits un à un comme s’il s’agissait d’un déguisement et, finalement, se tourna vers moi, sa baguette à la main, son arrogance de nouveau plantée comme un masque sur son visage. Je plissai les paupières, les siennes cernées de noir car le manque de sommeil devait l’affaiblir d’autant plus une fois de retour dans sa carcasse de bipède. Il n’accepterait aucune aide, aucune pitié. Personne n’avait pitié de Leviathan Faust, paraissait-il. Mais j’étais navré pour cet homme depuis que j’avais compris que le centre de gravité de toute sa personnalité était la solitude. Encore un point commun qu’il n’admettrait pas, car il était perpétuellement entouré, il connaissait tout le monde et réciproquement, son nom résonnait ici comme ailleurs, précédent une réputation qui le surplombait lui. Cependant peu pouvaient prétendre savoir qui était vraiment Leviathan. Moi-même je n’en étais pas certain. Et, pour tout avouer, je n’étais pas sûr de véritablement le vouloir. « Je te manquais tellement que tu devais venir me chercher en plein cœur de la forêt ? Adorable. » Je laissai un rire s’échapper dans un souffle silencieux. Si seulement cette rencontre avait pu être telle qu’il la décrivait, simplement pour prendre de ses nouvelles puisque nous ne pouvions plus nous voir aussi régulièrement qu’auparavant. Je cillai, hésitant à allumer une nouvelle cigarette avant de laisser cette pensée de côté. L’animosité bestiale de Levi me passait l’envie de fumer puisqu’en bon médicomage et à présent, en fier loup, roi de la forêt, mon penchant pour une drogue qui empoisonnait à la fois mon corps et la nature autour de moi l’agaçait profondément. Je songeai à des dizaines de répliques sans oser les prononcer car je jouais avec le feu avant même de l’avoir fait naître. Une voix en moi me souffla les regrets que j’éprouvais en étant venu. Il n’avait pas à connaître ma décision, ou l’aurait sue de toute façon, puisqu’il parvenait à être au courant de tout. Néanmoins, il y avait cette chaleur mystérieuse au fond de moi qui m’avait poussé à le retrouver pour lui dire de vive voix comme pour me prouver que j’avais encore la force de lui faire face. Si je ne lui disais pas maintenant et qu’il l’apprenait d’un autre, je tendais à croire que sa déception m’écarterait définitivement de sa vie et, malgré tout ce que m’inspirait l’américain, je ne voulais pas que cela arrive. « Ouais, j’imagine … » admis-je finalement, contre toute attente, le quittant des yeux pour détailler le fond de la clairière, marquant un silence trop long pour qu’il ne remarque pas que quelque chose avait manifestement changé. Ce n’était pas mon genre de lui accorder une victoire verbale aussi vite mais je me savais pragmatique dans des instants pareils et broder sur les mots pour tourner autour du pot ne servait à rien aujourd’hui : Leviathan m’arracherait ce que j’étais venu lui dire de la gorge s’il en avait envie, sans le moindre scrupule.
Je déglutis avant de retrouver son regard qui luisait d’un air sauvage à travers l’obscurité. J’avais l’impression qu’il changeait à chaque fois que nos chemins se croisaient de nouveau depuis sa morsure. Je me demandai si j’avais abandonné aussi vite mon humanité lors de mon exil mais constatai que plus le temps passait, plus les souvenirs s’estompaient et je ne pouvais dire si cela me rassurait ou m’attristait. Les deux probablement. Je mis nonchalamment mes mains dans mes poches et haussai les épaules pour paraître désinvolte avant de reprendre la parole. « Je suis allé à Poudlard y’a quelques jours. Voir s’ils ne foutaient pas le bordel depuis que tu es parti. » Le visage de la jeune Serdaigle apparut dans mon esprit et souris d’un air absent. Il y avait quelque chose en Thalia Selwyn qui avait éveillé en moi une émotion effacée que j’associais à mon passé, à celui que j’avais été autrefois et qui se trouvait enfoui sous les décombres de mon identité brisée. Et je trouvais cela étrange que Romy n’ait jamais réussi à véritablement me convaincre tandis qu’une entrevue avec une gamine qui m’avait parue bien insolente par moment ait eu raison de mon scepticisme. Tu devrais la consulter Levi, paraît qu’elle lit l’avenir, songeai-je, amusé, et pourtant perturbé par le prétendu don de la jeune sorcière, malgré l’humour avec lequel je m’en défendais. « Eh bien c’est pas mal le bordel. » Je ne savais pas par où commencer si bien que je ponctuai ma déclaration d’un silence, énumérant dans ma tête les châtiments que l’on infligeait aux élèves et le règlement puriste qui vomissait son autorité dans les couloirs du château. « Du coup j’ai décidé de me battre aux côtés des résistants. » Levi avait été mis au courant de l’ostracisme poussé à l’égard des nés-moldus à Poudlard puisque cela avait fait la une des journaux les plus lus du Royaume-Uni. Il se doutait donc bien que ma décision était fondée. Je ne lui demandais pas de le comprendre, je doutais qu’il soit réellement capable de se mettre à ma place. Je lui demandais juste de l’accepter. « Et je pense que tu devrais faire de même. » Ma voix s’éteignit, nous laissant dans un silence que seule la brise glissant dans les sous-bois venait perturber, mais je hurlais intérieurement car mettre des mots sur ces pensées éparses éveillait en moi la clameur imperturbable de la rébellion, celle-là même qui viendrait fatalement s’écraser contre les convictions égoïstes de Leviathan sans même les ébranler, j’en avais pleinement conscience.
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MessageSujet: Re: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:46

L’anosmie était totale.
A chaque pleine lune, Leviathan était perdu entre deux états, et il se déchirait à essayer de se reconstruire. Car dès que la lune descendait, il regagnait ce corps humain, et ce corps lui était si familier tout en étant un parasite infiltrant ses os. Dès la première bouffée humaine d’air, qu’il happait comme un survivant d’une noyade, il se rendait compte qu’il lui manquait quelque chose qui retournait son sang. Il lui manquait les odeurs, celles qui étaient primordiales dans un état d’animal, et qui étaient futiles et redondantes pour l’homme. Cette première respiration lui apportait de millions d’informations, mais une seule était importante : il était vide sans cette perception d’odeurs. Il était vide de toute intensité, de tout environnement qui l’entourait quelques minutes plus tôt. Lui qui avait toujours vécu seul, et qui s’était toujours très bien contenté de cet état se réveillait désormais avec une haine féroce de cet instant de profonde solitude. Car elle était physique, elle creusait ses veines et ses artères de millions de coupures, silencieuses et invisibles mais non pas indolores. Sa vie avait été esseulée, mais consciemment, volontairement. Leviathan évitait les autres comme la peste, et il rechignait à toute ouverture qui signifiait se mettre au niveau de ces pèquenauds qu’il trouvait sur son chemin et qui malheureusement partageait le même espace vital. Il était seul parce qu’il était profondément égoïste, indépendant et parce qu’il trouvait un refuge et une sécurité dans le fait d’exploiter seul son environnement. Mais ce vide d’odeur, cette sensation intrinsèque à la transformation de loup à homme était d’une cruauté inavouable. Car elle était là, la réelle malédiction du lycanthrope.
Ce n’était pas la transformation en elle-même, et la douleur d’une métamorphose profonde, qui modifiait les os et les articulations, qui poussaient les organes et dérangeaient les systèmes. La malédiction résidait dans l’avant et l’après. Lorsqu’il se réveillait et qu’il était seul parce que toute l’intensité du loup l’avait quitté pour lui rendre une enveloppe dénudée de passion; lui que la terre entière avait désigné comme un homme intense se trouvait vide de tout. La communion de l’animal et de la nature, cette même affection profonde dont sa mère lui avait tant parlé, le parcourait lorsqu’il enfonçait ses pattes dans la terre meuble se désintégrait lorsque ses pieds foulaient le sol. Sa peau était trop fine, et les follicules pileux étaient pathétiques dans leurs insensibilités. En l’espace de quelques mois son âme - cet organe spirituel dont il s’était toujours moqué - s’était métamorphosé pour accueillir en son sein une nouvelle entité qui se fondait parfaitement avec l’ancienne, une cruelle mais honnête, une qui montrait les crocs mais n’était pas dangereuse.
Et il y avait Eachan devant lui, l’homme qui connaissait peut-être mieux que quiconque cette sensation de perte de sensibilité. Il était homme mais renard, il se perdait également entre les deux. Leviathan avait pu l’observer lorsqu’il l’avait soigné pendant de longues semaines, lorsque le regard d’Eachan se perdait et qu’il ne se retrouvait plus dans ce corps humain, dont les sensations étaient courbées par un esprit trop développé. Un animagus était normalement moins animal qu’un lycanthrope, mais Eachan était différent. Il avait passé tant d’années enfermé dans un corps réduit et vorace qu’il avait passé la frontière de l’animalité au détriment de son humanité. Leviathan le regardait maintenant avec un nouveau regard, plus brillant, plus compréhensible. L’écossais soupirait-il aussi, lorsqu’il observait son corps d’homme marquer les plis des années, et qu’il se souvenait de l’aisance des mouvements dans un corps qui s’opposait magiquement au temps?
« Tu as l’air de mauvais poil. » Il haussa un sourcil, la voute parfaite exprimant son désintérêt complet pour l’humeur mesquine d’Eachan. Il était de mauvais poil car il n’en avait plus, et que l’existence humaine perdait toute beauté lorsque la réalité le frappait telle une masse. Il reprenait peu à peu conscience de la gravité qui exerçait ses effets, pour son plus grand malheur. Leviathan aimait prétendre n’avoir aucun raison de s’inquiéter de l’état du monde, mais il s’était attaché à d’autres êtres vivants, qui eux, n’étaient pas comme lui, et cela le dévastait bien plus que d’être dans un corps qui ne le satisfaisait plus.
Leviathan supporta le regard d’Eachan tandis que les deux hommes s’observaient, se trouvaient des similitudes tout en détestant la comparaison. Eachan le jugeait de cet oeil inquisiteur qu’il maîtrisait depuis leur première rencontre. Ses yeux sombres cachaient ce qu’il pensait, mais Leviathan n’était pas n’importe quel homme. Qu’importait ce que l’ancien auror pouvait penser sur lui ; il reviendrait toujours à ses côtés, abattrait toujours la solitude qui était celle de Leviathan, libérant le monstre primitif sans un regard pour les autres. Eachan pouvait juger le chaos dans les tripes de Leviathan autant qu’il le voulait, mais l’américain savait qu’ils n’étaient pas si différents.
« Ouais, j’imagine … » L’honnêteté de ce propos perturba profondément le lycanthrope, et il cilla. Leviathan était incapable de répondre normalement à une telle phrase, car son esprit s’entourait de cynisme et de sarcasme pour ne pas s’aventurer dans les dédales des sentiments. Eachan s’extirpait de la joute verbale et laissait Leviathan pantois. Il ne détourna cependant pas son regard, préférant juger les troubles qui se dégageaient de l’écossais. « Je suis allé à Poudlard y’a quelques jours. Voir s’ils ne foutaient pas le bordel depuis que tu es parti. » Leviathan croisa les bras, son visage n’exprimant rien de la surprise qu’il ne pouvait pas ressentir car il savait très bien ce qu’il se tramait à l’intérieur de Poudlard. « Eh bien c’est pas mal le bordel. » Sa réponse était un simple bruit moqueur, traduisant son désintérêt total pour une telle nouvelle. Il n’était pas en état de s’inquiéter pour d’autres. Sebastian était à l’abris, Feng était avec sa mère, et Roshario se débrouillerait ou périrait. Ils périraient tous un jour ou l’autre de toute façon. « Du coup j’ai décidé de me battre aux côtés des résistants. » Sa réponse fut tout autre, lorsqu’il s’étouffa sur sa respiration suivante, ses yeux redescendant de leur observation du ciel pour se centrer sur Eachan. « Et je pense que tu devrais faire de même. » Il éclata de rire, la gorge sèche par une transformation brutale rendant le bruit morbide, et dénué de son charme habituel. « Tu te fous de ma gueule? » Il bougea alors, son corps possédant encore quelques traces du prédateur pour se rapprocher d’Eachan. « Tu fais ce que tu veux avec ta putain de vie - malgré les heures que j’ai maintenant perdu sur toi, » continua t’il. « Mais tu me laisses en dehors de ça, capiche? Tu gardes ton idée de merde pour toi. J’ai autre chose à faire que de jouer à la guerre. Mais éclate toi, je t’en pris! »
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Quelque chose se brisa en moi, alors même que rien ne semblait bouger autour de nous. Le choc fut silencieux et invisible, mais je pouvais sentir un malaise gronder au sein de ma poitrine, gonflant à mesure que les secondes passaient. Le froid dont s’était paré Leviathan pour s’adresser à moi devait probablement en être la source et je compris avec amertume que je n’avais pas choisi le bon moment. La nuance était trop subtile : j’abusais de l’intimité de Leviathan, ce même Leviathan qui ne cessait de se montrer à tout le monde, que tout le monde connaissait, qui n’avait rien à cacher car son exubérance faisait sourire malgré ses frasques. Ce même Leviathan qui ne choisissait aucun camp car seul le sien comptait, seule son opinion méritait qu’il s’attarde sur un sujet, quel qu’il soit. Ce même Leviathan dont j’avais percé il y avait déjà si longtemps le secret de la solitude, relatant mes hypothèses à un Shafiq mal luné et une Londubat conciliante au fond d’un grenier dans lequel ma claustrophobie s’était mêlée à une étrange crainte de ce qui pouvait se trouver dans les recoins sombres des vieilles maisons, ceux vers lesquels nos yeux évitaient de regarder, de peur d’y voir quelque chose que nous ne voulions pas connaître – ou reconnaître. Car nous savions tous quelles étaient nos peurs les plus profondes mais nous nous persuadions avec toute la bonne volonté du monde que ne pas y penser servait à les faire disparaître. De quoi as-tu peur, Leviathan ? Il ne me l’avait jamais dit, et je trouvais cela injuste car son regard perçant et inquisiteur devinait les miennes avec l’aisance d’un devin. Nous n’étions pas égaux l’un face à l’autre : il était plus cultivé, plus soutenu, plus charismatique et plus doué que moi. Il brillait d’une excellence qu’il s’était accaparé comme un enfant refusant de partager son gâteau d’anniversaire avec ceux qu’il avait invités pour se complaire dans son égoïsme. Et je détestais ça, car je me présentais toujours devant lui dans l’espoir qu’il me donne une part, tout ça parce qu’une fois, aux confins de nos souvenirs les plus malléables et les plus anxieux, je lui avais sauvé sa vie fragile. Mais il m’avait forcé à l’oublier car à son tour, il m’avait sorti de mon abîme douloureux et sauvage, à coup de refrains rock effrénés et de piques caustiques. Je te déteste. J’avais pensé cette phrase et son contraire plus d’une fois pour me rendre compte que finalement, son sens n’avait pas d’importance puisque l’influence que l’américain avait sur moi en restait inchangée. Et je ne pouvais pas partir faire la guerre sans lui en toucher deux mots, dans l’espoir vain et naïf que cette influence était réciproque.
A mon annonce, il manqua de s’étouffer sur sa propre respiration, puis finit par éclater d’un rire sombre auquel je m’étais attendu, achevant de recouvrir l’once d’espoir que j’avais placée en lui. Il se moquait de moi et de ma détermination soudaine. Mais il n’avait probablement pas conscience de ce que cela perturbait en moi : moi l’Auror déchu, le faux mafieux, le camé lâche et damné par des années passées à quatre pattes dans la boue et les fougères. Moi qui cherchais la rédemption avec la hargne de celui qui n’avait rien à perdre à part une vie à laquelle il ne voulait pas tenir – mais à laquelle il tenait malgré tout, l’expérience me l’avait prouvé maintes fois à présent. J’écoutais la voix de la raison, ces douces notes dans lesquelles je reconnaissais le timbre de Romy. Je voyais déjà son visage s’éclairer d’un sourire lorsqu’elle me verrait à sa recherche autour de Godric’s Hollow, son air satisfait qui se passait d’être hautain car elle ne savait qu’être sincère avec les autres, un peu comme moi au fond, mais elle se débrouillait mieux. J’avais hâte de lui faire cette joie. Je regrettais presque d’être venu voir Leviathan, crédule que j’étais. Son visage froid et mesquin me figeait dans la colère – et il connaissait très bien cette dernière, peut-être même mieux que tout le reste. « Tu te fous de ma gueule ? » Parce qu’il savait être vulgaire quand il le voulait. Il coupla ses mots d’une avancée, et ce rapprochement tendait plus vers le reflexe animal que d’un mouvement calculé : je l’avais énervé. « Tu fais ce que tu veux avec ta putain de vie – malgré les heures que j’ai maintenant perdues sur toi. Mais tu me laisses en dehors de ça, capiche ? Tu gardes ton idée de merde pour toi. J’ai autre chose à faire que de jouer à la guerre. Mais éclate-toi, je t’en prie ! » Je sentais le loup gronder contre sa poitrine, encore trop présent pour lui laisser le répit de la parole. Mes doigts se serrèrent en un poing solide, mais leur maigreur me fit mal. Je pouvais sentir mes os crisser sous ma peau flasque et ils me rappelaient à ma condition : celui d’un homme faible. Mes chemises étaient trop larges car il m’était impossible de grossir. Après tout, mon corps était trop grand pour l’esprit qui l’occupait et j’avais cette allure gauche sous forme humaine, je ne marchais pas droit et mon dos se courbait car il ne trouvait pas l’équilibre naturel qu’une personne ordinaire possédait. J’étais une bête curieuse, à défaut d’être sauvage. Encore quelque chose que Leviathan faisait mieux que moi : être libre.
L’était-il vraiment derrière ses manières bourgeoises que je détestais ? Un sourire m’échappa car j’étais trop courroucé pour trouver quoi que ce fût drôle. Je comprenais presque mieux que personne ce qu’il ressentait dans ce nouveau corps puissant et performant. Sa forme lupine ne devait pas manquer de charme, elle non plus. Mais la liberté était bien pauvre lorsqu’elle dépendait du clair de lune et l’aigreur de Leviathan en cette aube encore endormie ne me trompait pas : il était rattrapé par les chaînes de la réalité qui lui retirait le plaisir sylvestre de la transformation. Et j’aurais voulu lui dire que ce n’était pas grave, qu’il ne fallait pas en abuser car cela perdrait sinon sa saveur, mais ses mots sagittaux se plantaient au cœur de ma détermination pour me rappeler que j’étais un être pathétique. Il me faisait douter, une fois encore. Et je le détestais de ne pas me faire me sentir à ma place, de me trouver ridicule lorsque je pensais faire une bonne chose juste car c’était selon lui une cause qu’il plaçait bien loin de ce qui l’intéressait, lui. Leviathan ne pensait pas que le monde tournait autour de lui. Il pensait que le monde tournait en-dessous de lui, et que rien n’avait d’importance à part ce qui réussissait à traverser la surface pour tenter de l’effleurer. En vain, la plupart du temps. « Marrant venant d’un mec qui s’est cassé de Poudlard au moment opportun. » sifflai-je d’une voix glaciale. « Je croyais qu’en tant que médicomage, tu avais une once de compassion pour la vie humaine. Je me trompais. » Cela m’avait toujours frappé chez l’américain : il soignait les gens presque par dépit. Si l’on n’était pas atteint d’un mal qui nécessitait un minimum de réflexion, cela ne l’intéressait pas. Leviathan ne jouait pas à la guerre, non. Il jouait avec la science et la vie. C’était un jeu presque plus dangereux car d’autres avant lui en étaient devenus fous. Et je m’étais lassé de le retenir en arrière alors qu’il respirait pour ces nouvelles expériences. « Si je te fais perdre ton temps, je vais te laisser dans ta solitude. Elle a l’air de te plaire. » Je marquai une pause. Je n’avais pas besoin de me redresser pour le surplomber d’au moins une tête, pourtant rien en moi ne pouvait me rendre menaçant à ses yeux. Il avait la mémoire si courte. « C’est dommage, parce qu’elle te rend vraiment con. » C’était donc ça, ce que l’on voulait se dire lorsque l’on ne se tournait pas autour, lorsque l’on ne s’assenait pas des répliques plus cyniques les unes que les autres ? Des mots aussi durs ? Mais si seule ma colère parlait à ma place, je reconnaissais en Leviathan une entité que j’avais crainte durant toutes les années passées à ses côtés : le mépris d’un homme plus puissant pour celui qui voulait être proche de lui sans parvenir à l’égaler. Mes problèmes ne seraient jamais les siens. Je faisais encore partie du monde qui nageait sous ses semelles brillantes de prospérité, celui qui se noyait perpétuellement dans son ombre et qu’il ne daignait sauver qu’en de rares occasions où sa bonne humeur tendait miraculeusement vers une forme de miséricorde désabusée.
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La lune était encore là.
Elle l’appelait, et déjà sous ses vêtements Leviation se consumait de l’intérieur.
Il voulait les détruire ces tissus qui bloquaient la respiration de sa peau. Il n’en avait pas besoin, il était loup, il était autre, il n’était pas homme. Il n’avait pas besoin d’être couvert.
Il était un animal qui se maintenait sur deux pattes par la simple force de son esprit. Il avait repris une forme qui ne lui correspondait pas et il voulait y retourner, dans cette forme de force et de sauvagerie, celle qui lui permettait enfin de mettre un vrai mur entre lui et cette population d’hommes à laquelle il ne voulait pas se joindre. La barrière de la langue, la barrière de crocs, la barrières des griffes.
La barrière d’un monstre, la barrière ultime que Leviathan Faust s’était crée, à bout de salive infestée et de plaies à jamais absorbées par de la peau fraiche. Il s’arrachait sa même peau marquée à chaque pleine lune, lorsque ses os devenaient trop long pour rester dans une enveloppe trop fine, trop fragile. Son visage se modifiait alors pour accueillir ces nouveau crocs et non, il les avait toujours eu ces crocs, il était né avec, mais dans sa langue, ils ont un autre nom ces crocs. Ses traits se répandaient en lambeaux par terre mais il criait déjà à la lune. Son coeur battait pour deux, pour un, pour un autre, pour lui. Mais le palpitant n’était pas si performant, alors le rythme fut tué par des mots trop forts, trop faux, trop vrais. Le brouillard sur ses yeux disparu, et il se rendit compte que son esprit l’avait quitté alors que le loup s’était rappelé à son bon souvenir, quand sa rage avait prit le dessus. Pendant un moment, il avait cru retourner à cette sensation si intense de la transformation, alors qu’il acceptait chaque modification de son corps avec un soulagement presque pervers. Mais ce n’était pas le cas. Il n’y avait que la rage, Eachan, la violence, Leviathan.
La lune était encore là, mais elle était loin, la lune. Elle pleurait son absence comme il avait pleuré sa distance plusieurs heures auparavant. Elle ne pouvait pas le toucher, le caresser de ses rayons, il était sorti de son influence, il redevenait la créature du soleil, celle qui n’avait plus cette barrière dont il avait tant besoin. Il était de nouveau le Leviathan en proie à des monstres qui n’étaient pas lui, lorsqu’il voulait avouer trop de chose qu’il ignorait encore à Eachan et qu’il n’arrivait plus à se rendre compte de ce qu’il avait appris sur l’autre, lorsqu’il y avait trop de variables et que pour la première fois de sa vie, il ne réussissait pas à trouver la solution de l’équation.
Et chaque regard d’Eachan était un coup de poignard supplémentaire après son discours. Eachan qui aurait du le comprendre, qui aurait du apprécier la vulnérabilité qu’il lui montrait en étant présent ici, entre l’heure du loup et celle du chien. L’heure du renard, peut-être. L’heure de la trahison, d’un homme qui encore une fois…
QUI ATTENDAIT ENCORE UNE FOIS TROP DE LUI.
Et la voix dans son esprit cogna contre son crâne, et la douleur n’était rien par rapport aux coups ensanglantés d’Eachan. Vas-y, transforme toi, expose la cavité de mon torse et montre le crocs, comme tu sais si bien le faire.
Montre les.
Montre les.

Ils allaient montrer qu’ils savaient plus se déchirer que s’aimer, et ils n’allaient jamais réussir à voir la poésie, ni même la tragédie. Ils étaient deux âmes exclues des récits mythologiques, des grandes épopées, celles qui tissaient des fils des Moires les couronnes dorées des héros. Peut-être étaient-ils Astérion, si jamais ils se retrouvaient dans les étoiles, le Minotaure à moitié animal, créature d’un amour divin, terrassé par la lame de l’aimé de sa soeur. Mais le fil d’Ariane existait bien entre les deux, les reliant inexorablement. Un fil qu’ils souhaitaient tous les deux couper, parce qu’ils savaient ce qui arrivaient à la fille ainée de Minos, celle qui se faisait abandonner. Qui était le victorieux, celui qui allait rentrer chez lui, paisible meurtrier, et qui était la victime, coupable d’avoir eu confiance, et qui allait finir enfin recueilli par l’alcool, consommation accompagnée des percutions de thyrses.
Le sourire d’Eachan était une injure supplémentaire, et la situation était une comédie et non plus une tragédie. Comédie de quiproquo, comédie de répétition, comédie, comédie. Leurs positions étaient inversées, alors qu’Eachan était celui qui souriait comme s’il ne prenait pas au sérieux les mots de Leviathan. Il y avait du pathos dans les lèvres d’Eachan, le cynisme d’un homme qui était tombé trop bas et qui n’avait jamais vraiment eu la force de se redresser. Il observait le monde avec des yeux trop vieux, et il examinait chaque respiration animale de Leviathan avait la pitié de celui qui savait trop bien que la descente ne valait jamais l’extase. Mais qu’importait ses mots, parce qu’il allait y retomber à chaque pleine lune, se laissant bercer par l’hymne à la vie d’une lune qui tranchait avec son incapacité à ressentir de l’empathie.
« Marrant venant d’un mec qui s’est cassé de Poudlard au moment opportun.»
IL ATTENDAIT ENCORE TROP.
Parce qu’il n’avait rien sur le visage de l’américain, parce qu’il connaissait chaque région d’organe qui pourrissait dans ses entrailles, et qu’il n’avait jamais rien fait pour arrêter l’hémorragie. « Je croyais qu’en tant que médicomage, tu avais une once de compassion pour la vie humaine. Je me trompais. » En tant que médicomage, il avait comprit qu’il n’avait aucune raison éthique de vouloir se soigner, de vouloir changer. Que le monde allait continuer à être ronger, que son travail était d’observer, cautériser les plaies, changer les pansements. Il n’était pas révolutionnaire, Leviathan. Il laissait ce luxe à ceux qui avaient encore de l’espoir, qui murmuraient des mots tendres alors que ses lèvres prononçaient du latin pour avancer la science pour une société qui ne méritait aucun de ses efforts. « Si je te fais perdre ton temps, je vais te laisser dans ta solitude. Elle a l’air de te plaire. » Le dernier effort d’Eachan, la contraction de muscles inexistants, et Leviathan sourit. Il connaissait mieux Eachan que n’importe qui. Pas parce qu’il l’avait observé, mais parce qu’il l’avait soigné. Sa magie avait redressé les tendons et réparer les nerfs, il s’était immergé dans un corps pourri par l’héroïne et parce que les cellules criaient à la nature et non pas à l’oxygène. L’espace d’un instant, Leviathan s’était mis au deuxième plan. Il s’était incliné devant sa volonté de sauver Eachan, il avait courbé l’échine pour la première et dernière fois. Il avait plongé ses mains dans le gore et dans la chaire, il avait touché les os d’Eachan, les avait redresser.
Comment pouvait-il ne pas le connaît après cela.
COMMENT POUVAIT-IL ATTENDRE ENCORE TROP?
« C’est dommage, parce qu’elle te rend vraiment con. »
La pitié d’Eachan était une arme avec laquelle il n’aurait jamais du entrer en possession, pas quand cela concernait Leviathan. Mais ce dernier l’avait laissé entrer, lui dévoilant sur un plateau toutes les faiblesses et ses qualités, lui demandant laquelle choisir.
take your pick, honey. they’re all yours.
make it hurt honey. make it bleed.

Et Eachan avait un instinct que Leviathan n’avait jamais eu, alors il s’était saisit de la plus coupante, de la plus tranchante, la seule véritable, qu’il avait voulu dissimuler au milieu de milles parures dorées.
you chose wisely.
« J’ai eu de la compassion par un drogué tombé sur ma porte, et regarde le résultat, » répondit-il, la voix enrouée par une énergie qui n’était pas vraiment la sienne. « Dis moi. » Sa voix claqua, et ses yeux devinrent ceux du médicomage, du scientifique, de l’être qui réfléchissait jusqu’à taire sa conscience, enfermée dans une cage dorée. « C’est ça ce qu’elle t’offre ta résistance? D’être autre chose qu’un raté? Un drogué? Mais tu penses qu’ils carbures à quoi pour se croire encore légitime de se battre? Tout compte fais, t’es bien tombé. »
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Ishikawa Ryuku
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MessageSujet: Re: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:47

J’hésitai, dans un battement de cils, à faire demi-tour et m’en aller. Tout avait déjà été dit ou signifié par l’animosité de nos corps sauvages. Leur langage était un dialecte que les prédateurs de cette forêt ne pouvaient comprendre et pourtant, ils semblaient nous observer, au bord de la clairière, cachés dans les fourrés. Car Leviathan, non content de dominer les hommes, s’était mis à conquérir le trône de ces sous-bois, et il lui avait été facile de l’obtenir. On ne refusait rien à un loup tel que lui : il avait le pouvoir du lion de la savane qui dormait en s’imprégnant des couleurs fauves que peignait le soleil depuis l’horizon plane, mais il possédait aussi la puissance de l’ours dont l’antre rocheuse accueillait quelques rayons de lune pour que ses rêves lui chuchotent une destinée glorieuse. Il était une chimère, et comme toute chimère, il aimait chaque être qui le composait sans pouvoir supporter leur cohabitation. Préfères-tu être le loup, l’homme ou bien le Léviathan ? Il fallait choisir entre la morsure qui l’avait fait renaître, l’être que sa mère avait mis au monde et ce qu’il s’était appliqué à inspirer aux autres avant de brûler les écrits religieux d’un sourire apocalyptique. Je l’observais ainsi à l’heure où il était les trois à la fois. Je l’observais souffrir, en réalité, souffrir d’une douleur qu’il aurait voulu à jamais garder enfouie en lui mais que je démasquais par ma simple présence. Voilà pourquoi il me la jetait à la figure. Je n’étais pas légitime car personne n’était autorisé à voir Leviathan succomber à ses faiblesses. Certainement pas moi, en tout cas. Il le croyait apparemment, lui qui m’avait vu revivre, redevenir humain au prix de ces mêmes souffrances. Tu as la mémoire sélective, Levi. Ne s’en souvenait-il pas ? Des injures, des cris, des transformations abruptes et de ma douleur après m’être échoué sur son tapis de fourrure ? Car nous aimions nous rappeler de ces instants dans des plaisanteries cocasses mais nous le faisions en omettant la majeure partie de ma convalescence, durant laquelle il avait dû chaque matin pendant de nombreux jours me rappeler qui j’étais et, pire encore, me rappeler qui il était. A quel prix s’en était-il attaqué à ma mémoire dégénérescente et à mon corps qui ne fonctionnait plus, m’apprenant de nouveau à marcher, à dormir, à vivre comme un être humain, m’arrachant de ce museau qu’il m’avait interdit de montrer les proies de son grenier ? Car oui, il y avait un prix à tout et notamment à celui d’être un animal, mais Leviathan était encore un jeune loup, paradoxalement. Il ne savait pas ce qu’il perdrait. Ce n’était pourtant pas faute de lui avoir montré. Pas faute de lui prouver qu’il n’avait rien à gagner en étant un animal, à part celui de terrifier ces contrés sylvestres car jamais elles ne l’accepteraient comme le maître des lieux, rôle auquel les loups aspiraient, volontairement ou non, par leur présence imposante. Et Levi ne pouvait même pas avoir le plaisir de s’affirmer en tant que loup auprès des Hommes, au risque d’en perdre sa réputation, ses amis, ses confrères, son poste, son laboratoire … sa vie qui ne tenait qu’à un fil car il ne pouvait compter ses alliés que sur les doigts de sa main griffue et j’en faisais manifestement partie, quelque part. Homo homini lupus est. Il parlait sûrement mieux latin que moi de toute façon.
Mais tu ne peux le supporter, Levi. Supporter que quelqu’un vît le masque qui lui servait de visage se fissurer sans même tomber. C’était le rendre trop vulnérable, trop prévisible, trop aliéné à lui-même alors que pour une fois, je pouvais confirmer qu’il était lui-même. Il était une mosaïque érodée par le temps mais j’étais certain d’assister à quelque chose d’authentique en cette nuit mourante, quelque chose qui me donnait de l’espoir pour cet homme car j’avais enfin la confirmation qu’il savait ressentir. Je n’étais pas celui qui allait en profiter mais ma simple présence lui criait le contraire, lui donnait le signal d’alarme car il ne voulait pas de trace humaine sur ses sens animaux. L’ironie coulait sur nos esprits comme la pluie d’un nuage chargé d’orage. Entre toi et moi Levi, je te laisse deviner celui qui est le moins humain. Je ne lui reprochais pas de préférer le loup à l’homme. Je pensais simplement qu’il ne serait jamais entièrement loup et qu’il fallait qu’il s’en rende compte avant d’en perdre la raison. Voilà où ses sentiments vibraient, entrant en fusion pour fondre et en recréer immédiatement d’autres, contredisant les précédant. Voilà ce qu’il cachait, voilà où il avait peur d’avoir tort et voilà pourquoi ses mots étaient si tranchants à mon égard : je connaissais la vérité qu’il ne voulait pas admettre. « J’ai eu de la compassion pour un drogué tombé sur ma porte, et regarde le résultat. » Le même drogué qui aujourd’hui le voyait souffrir d’un manque analogue. Le même drogué qu’il n’avait d’ailleurs jamais eu l’occasion de voir en période de consommation, mais il lui était si facile de brandir mes faiblesses pour dissimuler les siennes, puisqu’il connaissait mon corps avec la précision d’un esprit scientifique. Tu me traites de drogué mais tu détournerais les yeux si tu voyais les marques sur ma peau car elles te rappellent celles qui strient ton cœur. Je savais pourquoi il était ainsi mais j’étais autant animal que lui, si ce n’était plus, et le renard montrait ses crocs plutôt que sa ruse. Cela lui arrivait, de temps à autres, lorsqu’il se lassait de toujours avoir le même rôle. « Dis-moi. » Je fronçai les sourcils, lui laissant le luxe d’être le plus sournois, à défaut d’être le plus sauvage. Il soulignait ses paroles du ton désabusé que je lui connaissais si bien. Parce que tu crois que c’est le loup en toi qui parle, Levi ? Il n’y a qu’un homme pour brasser à ce point la noirceur que contient la carcasse des autres. Même les vautours s’en éloignent. Je préférais être le drogué repenti que l’aristocrate au cœur misérable. Je préférais être le drogué. Je préférais être le drogué. « C’est ça ce qu’elle t’offre ta résistance ? D’être autre chose qu’un raté ? Un drogué ? Mais tu penses qu’ils carburent à quoi pour se croire encore légitimes de se battre ? Tout compte fait, t’es bien tombé. » Et quoique. J’aurais pu lui dire qu’ils carburaient à la compassion dont il était dénué, mais il m’aurait de nouveau ri au nez car Leviathan Faust n’avait pas besoin de croire en quoi que ce soit : les autres s’en chargeaient pour lui.
Il n’y avait pas de doute sur le fait que sa réplique était basse, même pour lui. Violer son intimité ne justifiait pas des mots aussi durs. Parler d’espoir non plus. Alors c’est ça, le vrai Leviathan ? Peut-être m’étais-je trompé, au fond. Peut-être aurais-je me contenter de faire mon travail, quinze ans plus tôt. Il s’en serait très bien sorti sans moi et il n’aurait pas eu à prononcer de telles choses. Et je voulais croire qu’il allait les regretter un jour, que mon regard brillant de rage car je retenais de justesse des larmes de douleur lui ferait retirer son injure, en vain. Je n’étais qu’un drogué après tout. Ni homme, ni renard, ni pur, ni moldu, mais manifestement, tout le monde s’accordait à dire que j’étais un drogué, et mes efforts importaient peu car j’allais le rester toute ma vie. Il suffisait d’une erreur irréparable. Leviathan aurait dû se réjouir d’être indéfinissable. Il brûlait d’envie de dire au monde qu’il était loup, je le voyais dans ses yeux à chaque fois que je les croisais depuis que j’avais appris sa métamorphose. Mais crois-moi, tu ne veux pas que le monde te le dise ensuite. Car il n’allait être que ça aux yeux des autres s’il ne restait pas prudent, tout comme il semblait aujourd’hui me réduire à mon erreur. Et, de toutes les insultes que l’on pouvait me lancer à la figure, celle qu’il avait choisie était de loin la pire puisqu’elle était de mon ressort, de ma responsabilité. Tu as choisi de consommer. J’avais choisi de me marginaliser. Même après tant d’années de sobriété, j’en souffrais encore. Tu sais pourquoi, Levi ? Parce qu’on ne peut pas différencier à l’œil nu un moldu d’un sorcier, un sang pur d’un sang métissé, un renard roux d’un animagus, mais un héroïnomane a juste à relever ses manches pour que tu puisses juger par toi-même de sa condition. De sa condition, non de sa peine. Parce que les malades ne souffraient pas, aux yeux de Leviathan. Seuls les individus pouvaient souffrir et ils n’étaient pas pertinents lorsqu’il s’agissait de science. « Mauvaise pioche Levi. L’héroïne ça te cloue au lit, ça te donne pas envie d’aller faire la guerre. » Mon ton était dénaturé, froid comme le son métallique d’un cliquetis menaçant. Je voulais garder un semblant de contenance, une teinte sarcastique à mes propos, mais tout cela se noyait petit à petit dans l’océan de colère duquel je m’approchais. J’avais déjà les pieds dans l’eau. La seule solution restait de tourner les talons et de m’en aller. Voilà tout. Tourner les talons et s’en aller. Je clignai des paupières : la moitié de mon corps baignait à présent dans le tumulte des vagues. « Mais tu sais … » Mes poings se serrèrent et ma silhouette se courba en avant, maigre et tordue. Les drogués lâchent pas l’affaire. Il était trop tard pour tourner les talons et s’en aller, car Leviathan créait toute une atmosphère propice à un débat dont il tirait les ficelles, et j’étais trop borné pour y échapper. « … je préfère être du côté des ratés qui tentent un truc plutôt que de celui des élites qui attendent que ça passe. » Rester neutre revenait à choisir le camp de l’oppresseur et je n’avais pas le choix que d’être chez les oppressés. Mais Leviathan si. Leviathan était riche, Leviathan était populaire, Leviathan était mondain et dilettante, Leviathan était quelqu’un. Sauf en ces nuits de pleine lune où il disparaissait pour n’être personne d’autre que ce loup dont il oubliait au réveil les souvenirs les plus vifs. « Mais si ça te dérange pas qu’on apprenne à des gosses à se lancer des Doloris entre eux, je vais pas te blâmer. » ajoutai-je d’un ton sombre et sérieux. « Tu vois ça avec ton propre miroir parce que moi j’en ai ma dose de tes conneries. » La dernière phrase m’échappa, en réalité. Ses conneries étaient probablement moins nombreuses que les miennes et je serrai les dents, ma main inconsciemment enroulée autour de ma baguette qui était restée dans ma poche. Il n’hésiterait pas à les compter pour me rappeler les erreurs que j’avais commises, pour me rappeler que, dans son imaginaire égocentré, je lui devais quelque chose et non le contraire. La mémoire sélective. Etrange, venant de celui qui ne se serait pas tenu debout devant moi aujourd’hui si je n’avais pas été présent pour lui quinze ans plus tôt. Mais je déchantais aujourd’hui au sujet de ce que j’étais pour lui, puisque je n’étais pas un ami, ni une cause suffisante pour aller se battre, et encore moins la voix d’une conscience quelconque qu’il peinait à étouffer au fond de sa cage thoracique vide. Alors qu’étais-je ? Ah oui.
Un camé en manque d’adrénaline.
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Ishikawa Ryuku
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MessageSujet: Re: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:47

« Mauvaise pioche Levi. L’héroïne ça te cloue au lit, ça te donne pas envie d’aller faire la guerre. » L’homme de science rétracta sa lèvre supérieur, son visage aux traits charismatiques ressemblant plus à un masque de nogitsune qu’à celui d’un humain. Pourtant, c’est toi le renard, Eachan, mais moi j’ai la malice, le pouvoir et toi t’as juste les neufs vies, t’es toujours là après tout. Il était comme ces kitsune, qui vivaient encore et encore, et qui n’étaient jamais touché par le temps. Leviathan existait dans un monde alternatif, et le terme de guerre résonnait dans son esprit, associé d’une définition vaguement scientifique. Il voyait le monde avec des yeux différents, et les pensées des autres ne l’effleuraient pas. La guerre était un problème qui ne le touchait pas, parce qu’il était dans la case supérieure, il était de ceux qui orientaient cette guerre mais qui n’étaient jamais au centre. Au coeur de sa paume résidait un pouvoir qu’il n’utilisait que pour ses simples envies. Ils murmuraient lâche, il susurrait égoïste. Il traçait des doigts une zone de gris dans laquelle il avait toujours évolué, à la démarche atavique, au prénom qui le destinait à plus grand que lui, à un sang qui n’importait que trop peu face à la puissance de son esprit. Il était une créature de contradiction, qui oscillait entre un charisme étincelant et une misanthropie dévorante. La société lui tournait autour, parce qu’il était Leviathan Faust, et que derrière ses sourires avariés se cachait un mystère dangereux, comme la texture soyeuse d’une araignée mortelle. L’argent coulait de ses doigts et chaque muscle de son corps était paré de marbre, jusqu’à cacher la rainure de ses veines. Cette même société était un monstre, un à des centaines de têtes, une Hydre au souffle pustuleux, indécent. Ce n’était même pas sa couleur de peau, qu’il effaçait à coup de ricanements, de cynisme d’un oppressé oppresseur, de cheveux gominés pour détruire les boucles sombres qui ne rentraient dans les photos des grattes-ciels new-yorkais. Mais dans les mouvements gravitationnels, Leviathan était un astéroïde  dont la seule destinée était de s’écraser sur une planète ou une autre, à se détruire dans l’explosion d’un monde, et il allait rire jusqu’à la fin, son visage se convulsionnant autour d’un sourire.
C’est moi que tu rejettes à chaque phrase, lorsque tu enfonces tes griffes dans mon torse, et que tu oses être surpris en voyant les miens s’enfoncer dans ta poitrine.
Il s’était longtemps cru si normal, si banal, alors que les adorations pleuraient sur ses épaules trop fragiles, et que les regards se détournaient parce qu’il était trop expansif, trop honnête, et qu’il était le trop de chaque qualificatif, et qu’il ne fallait pas être de trop dans cette société. Les compliments étaient devenus du venin, et il était un Pukwudgie alors il s’en était armé, il était le maître des potions, incapable de devenir invisible. Mais son feu et son poison étaient suffisants, alors il brûlait et ses mots devenaient plus cruels que n’importe quel neurobloqueur.
« Mais tu sais … »
je sais
je sais beaucoup trop eachan
c’est mon problème
c’est le tien aussi
et tes mots sont les reflets des miens, et courbe toi un peu plus, mets toi à ma hauteur, regarde dans mes yeux, et brûlons, veux-tu
tu sais ce que c’est de brûler n’est-ce pas
la drogue dans tes veines, la stimulation d’un esprit en manque, les divagations de l’euphorie qui vole, puis qui tombe
détresse respiratoire

« … je préfère être du côté des ratés qui tentent un truc plutôt que de celui des élites qui attendent que ça passe. » Il considéra peindre son visage en sa meilleur giving a damn expression, mais il n’en avait pas, et les mots d’Eachan résonnaient encore, alors ses traits restèrent crispés dans cette attitude de scientifique, celui qui voyait le monde brûler parce qu’il avait lancé la combustion, la première décharge de l’arme thermobarrique.
tu sais ce que c’est, Eachan?
d’être un scientifique hypersensible
c’est faire ses armes sur soi-même
première opération à coeur ouvert, sans anesthésie
j’ai pas eu le choix de courber mes idées et mes sentiments moi,
j’ai sublimé les premières en endormant les autres

« Mais si ça te dérange pas qu’on apprenne à des gosses à se lancer des Doloris entre eux, je vais pas te blâmer, » ajouta Eachan, et il y avait des sifflements dans ces mots, des répercutions qu’ils ne pouvaient pas complètement saisir. « Tu vois ça avec ton propre miroir parce que moi j’en ai ma dose de tes conneries. » Et il allait exploser, Leviathan, parce que ses lèvres avaient commencé leur montée tragique, leur ourlet vers le sourire qui était celui d’Apollon qui observait Cassandre se consumer. Pour un homme qui désirait tant la lune, qui lui hurlait son amour, qui lui offrait son âme, il était trop lié au dieu du soleil, à ses flèches empoisonnées.
« Soit le raté alors. Et quand tout va échouer, tu pourras faire comme avant. Retomber et te cacher. » L’hypocrisie d’Eachan résonnait avec la sienne, mais Leviathan n’avait jamais fait l’effort de cacher ce qui n’allait pas avec lui. Il exposait chaque défaut au yeux du monde qui allait le juger de toute façon, parce qu’il avait toujours mieux réagit avec la colère des autres que leur affection. Il cherchait les débats parce qu’il vivait dans une sorte de continuum où l’amour ne réservait rien de bien tandis que la colère était synonyme de vérité, et qu’il pouvait enfoncer ses talons dans le coeur des autres jusqu’à en sortir tout ce qui pourrissait en eux. Eachan se voilait les yeux avec l’espoir du type qui n’avait rien à perdre. Il y avait toujours quelque chose à perdre, et il pensait avoir touché le fond, et n’avoir qu’à se redresser. Pourtant il n’était pas capable de juger de sa propre condition, puisqu’il était dépendant. Il préférait juger les autres, juger Leviathan, au final devenir un de ces gens qui ne voyaient que ce qu’ils n’avaient devant les yeux. Mais il se cachait tellement, Eachan, que cela n’étonnait même pas l’américain. Il avait les yeux brouillés par une vision humaine qu’il n’aimait pas, qu’il ne comprenait pas. Il essayait tellement de se fondre dans cette carcasse humaine qu’il suivait le fil tracé par tous les humains qu’il voyait. Il criait au monde comme Leviathan criait à la lune. Mais si Leviathan souhaitait rester dans cette forme où il n’avait pas besoin d’être jugé, de se confondre à ce qu’ils attendaient de lui, Eachan suppliait de ne plus se sentir étranger, de pouvoir resserrer son coude sans sentir les cicatrices à jamais posées dans le creux, à réfléchir comme un humain. « T’as eu cette idée tout seul, ou quelqu’un te l'a soufflé dans le creux de l’oreille? Elle est bonne au moins? » demanda t’il, parce qu’Eachan avait osé lui demander quelque chose que même Bonnie n’avait pas prononcé. Il y avait eu la remarque dans ses yeux, mais il y avait eu cette compréhension qui venait d’années d’amitié, cette pommade qu’on passait sur les cicatrices des relations trop longues, lorsque chaque défaut devenait une nouvelle raison d’aimer l’autre. Il n’aurait pas accepté la remarque de Bonnie, mais il n’aurait pas réagit ainsi. Parce que Bonnie, elle était dans son sang, parce que ses remarques n’étaient pas là pour briser ses masques, parce qu’il n’avait jamais été autre que vulnérable devant ses yeux.
Parce qu’Eachan le renvoyait à ce qu’il manquait en lui. Et Eachan oubliait que chaque trou devait être comblé, et qu’il avait essayé de remplir les plaies à l’aide de ce qu’il avait sous la main, comme Eachan avait fait en même temps, sur un autre continent. Mais ce n’était pas la drogue qu’il avait trouvé, mais encore un peu plus de vide, des pensées trop envahissantes, des sourires sournois, et des sortilèges, parce que s’il était puissant et intelligent, il arrivait presque à se croire entier.
« Les Doloris forment la jeunesse, t’as jamais entendu ça? » demanda t’il enfin, parce qu’il n’était jamais très loin de son mode sardonique de base, et que ses sentiments volaient trop haut au dessus de sa tête pour qu’il puisse les lier à ce qu’il restait de force à son palpitant. Il lui manquait des battements, à cet organe trop petit pour un torse trop large. Il pulsait trop de sang dans un corps trop faible, trop fragile, un corps qui se modifiait depuis des années pour accepter ce que son cerveau lui ordonnait de vivre avec.
lequel de nous deux
dis moi
lequel de nous deux
va plier les genoux avant
si tu ne demandes que ça, je peux le faire
mais s’il te plaît
n’en demande pas plus.
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Je te demande si tu sais ce que ça fait.
Il le savait forcément car il savait tout. Tout pouvait être décortiqué, disséqué et analysé, même le plus complexe des sentiments humains. Je te demande si tu sais ce que ça fait. Même le plus ardu des sortilèges, celui que l’on scellait dans un grimoire, priant pour que jamais personne ne mette sa main sur des écrits trop sombres. Mais est-ce que tu sais ça ? Est-ce que tu sais ce que ça fait ? Même les rêves des autres, leurs songes les plus étranges, ceux qu’ils avaient honte de raconter car ils savaient faire les connexions à leur réveil et ces dernières les laissaient démunis, souffrant d’une sensibilité encore trop présente alors qu’ils avaient cru échapper à leurs démons. Les rêves paraissaient si réels qu’ils pouvaient remettre n’importe quel traumatisme d’actualité. N’importe quelle mauvaise rencontre. N’importe quel souvenir occulté. Alors, tu sais ? Car moi je savais. Je l’avais vécu et je pouvais encore sentir la peine que cela procurait, fermentant au fond de ma poitrine jusqu’à parfois regagner mes membres de verre. N’était-ce pas ce qui manquait à Leviathan ? La douleur brute et inouïe d’une blessure ? Préférait-il celles qui se voyaient, les balafres béantes qui lacéraient la peau ou bien celles, invisibles, qui pourtant ne disparaissaient jamais ? J’aimerais savoir. Mais il ne faisait que répondre en s’imaginant qu’il ne pouvait souffrir car il n’avait jamais connu la douleur : sa peau était encore trop saine, son regard trop brillant, sa condition trop prospère. Peut-être était-ce moi qui, au contraire, croyais avoir tout subi. Nous nous jugions si vite l’un l’autre car nous pensions nous connaître, lui car il m’avait soigné, moi car j’avais vécu ce qui le torturait à cet instant, renaissant inlassablement pour raconter aux autres les erreurs que j’avais commises. On disait que le renard avait le caractère des chats sauvages, plus que des chiens ou des loups. Avait-il aussi son adresse et sa maîtrise du destin, ses vies et son aura de démon ? J’étais là, après tout. Face à mon démon, celui qui apparaissait lorsque mes phalanges brisaient mon miroir, car c’était sa voix à lui qui me tirait de mon sommeil lorsqu’il était trop agité. Mais Leviathan étaient de ceux qui ne pouvaient créer, car on créait à son image et qu’il détestait la sienne : les monstres qui jaillissaient de ses doigts étaient faits de fusain noir, d’encre de Chine, de cambouis nauséabond s’échappant de ses côtes qu’il osait parfois écarter pour vérifier qu’il avait un cœur. Mais il était incapable d’être certain de ce qui se cachait dans son corps : il avait fait son métier que d’étudier ceux des autres. « Sois le raté alors. Et quand tout va échouer, tu pourras faire comme avant. Retomber et te cacher. » C’était donc ce qu’il pensait derrière ses sourires aguicheurs et son charme si arrogant mais si naturel qu’on aurait pu le confondre avec le sang qui coulait dans ses veines. C’était donc ce qu’il avait toujours pensé, et même si j’essayais de m’extirper de son jugement pour avoir une vue plus globale de l’instant, je ne parvenais pas à échapper au son de sa voix cassante qui s’amusait à me faire du mal. Je fis un pas en arrière sans m’en rendre compte, pressé par sa suffisance. J’étais le raté à ses yeux, celui qui n’avait pas été capable de le suivre sans qu’il ne s’en rende compte, celui qui n’avait pas été capable de le laisser mourir, celui qui n’avait pas été capable de se retenir du vice, celui qui n’avait pas été capable de faire face à ses responsabilité et celui qui, aujourd’hui encore, n’était pas capable de rester neutre face à l’injustice. Mais cette dernière était comme son contraire : éternellement subjective. Et Leviathan ne semblait pas avoir de définition à poser sur ces mots car ils lui étaient trop étrangers. Qu’est-ce que la justice pour un homme qui n’a jamais connu le besoin ou la persécution ? Lorsque nous étions insultés, il nous répondait par une simple contrariété bourgeoise, typique de celui qui n’avait jamais été à plaindre. Je lui jalousais chaque jour la chance avec laquelle il était né mais l’envie n’était pas le seul péché qui pavait ces sous-bois. Nous étions gourmands de chair fraîche derrière nos crocs luisants, avares de nobles sentiments, notre orgueil respectif s’écrasant sur celui de l’autre, chacun animé par le désir et la colère, mais seul Leviathan baillait face à mes engagements qu’il trouvait trop ennuyeux pour le faire se lever de son lit après la pleine lune. Alors pourquoi m’avoir fait croire à une amitié qui n’existait pas ? Puisqu’elle comptait pour si peu. Pourquoi ? Puisqu’elle avait la couleur de l’échec qu’il retrouvait dans le reflet de mes prunelles ? Pourquoi ? Puisque j’étais un lâche, un raté, un fantoche, un homme qui n’avait de valeur que lorsqu’il était animal, et qu’il appelait ces valeurs des instincts ? Pourquoi Levi ? Dis-moi pourquoi ? Pourquoi me le dire aujourd’hui alors qu’il aurait pu il y a quinze ans. Pourquoi souligner la futilité de mes engagements lorsque ceux-ci, même vains, me poussaient à regarder la lumière du jour sans détourner les yeux. Pourquoi ?
Parce qu’il était Leviathan Faust : un homme, un loup, une apocalypse. Parce qu’il pouvait.
Mais je ne voulais pas le laisser faire, pas encore une fois. Je ne voulais pas qu'il arrache de mes yeux des larmes qu’il ne méritait pas. Je ne voulais pas être un élément du décor comme la dernière fois, lui ayant sauvé la vie pour qu’il salisse la mienne de son mépris.
Je sais ce que tu attends de moi, Eachan. Mais si je te l’accordais, je ne serais plus ce connard de Levi.
Et, encore une fois, ses excuses et son repentir n’auraient aucun sens si je l’avais forcé à me les donner. Je voulais des sentiments bruts et authentiques. Je voulais de la sincérité, mais voilà ce que c’était que sa sincérité. Me dire qu’après toutes ces années, je n’en valais plus vraiment la peine.
C’est si grave ? Que tu ne sois plus ce connard de Levi ? Vraiment ?
Il y aura un autre masque derrière ton amertume, plus lisse au toucher, plus fragile peut-être mais plus puissant que tu ne le penses, toi dont je ne pourrai jamais tracer les frontières de l’esprit tant il est immense, travaillé, fourni et indescriptible. Toi qui resteras toujours dans un coin de mon existence, ton souvenir trop brûlant pour que je réussisse à l’éteindre un jour.
Si tu ne veux pas de moi, d’accord, mais laisse-moi m’en aller alors
.
« T’as eu cette idée tout seul, ou quelqu’un te l’a soufflée dans le creux de l’oreille ? Elle est bonne au moins ? » Mes dents se serrèrent et je retins une transformation abrupte. Il connaissait déjà le poids du renard percutant son corps et posant ses pattes sans vergogne dans le trou de son estomac, celui qui se nouait lorsque les gens normaux avaient mal. Qu’est-ce qui ne va pas chez nous, Levi ? Je retins les larmes aussi, comprenant que si je prononçais le moindre mot, il serait accompagné de sanglots et Leviathan les attendait presque avec impatience, puisque m’humilier ne lui avait jusqu’alors posé aucun problème. A quand remonte ton dernier chagrin ? Il voulait que je pleure à sa place car il n’en était pas capable, ses canaux asséchés par l’insensibilité dont il faisait preuve, dont il se targuait en tant que scientifique. Je savais qu’il ne s’agissait pas de vide mais de non-dits, prenant de plus en plus de place entre ses côtes. Etait-ce la raison pour laquelle il préférait le loup en lui ? Car son corps puissant pouvait étouffer plus de douleur que sa carcasse bipède ? Non Levi, la douleur s’adapte à tous les corps. Tu devrais le savoir, tu l’as sûrement étudié. Mais il étudiait tout ce qui lui faisait peur afin de trouver un moyen de contourner la fatalité. N’allait-il pas un jour être le premier à déjouer la mort elle-même ? Il était en tout cas le candidat idéal.
« Les Doloris forment la jeunesse, t’as jamais entendu ça ? » Pas de métamorphose, pas de larme, mais une rage en acier transperçant mon enveloppe charnelle pour accrocher ma mémoire à fleur de peau. Tu ne sais pas ce que j’ai entendu d’autre, comme horreur. Il pouvait imaginer et non savoir. Ses provocations successives avaient trouvé leur paroxysme en cette question ultime. Mon cœur s’étouffa le temps de me faire perdre mes moyens et la prise sur ma baguette se raffermit tandis que je l’extirpai de ma poche, sans vraiment comprendre ce que je faisais, sans vraiment être sûr de la portée de mes actes, mais absolument certain d’avoir envie de faire ce que je me préparais à faire. Si j’étais le plus humain des animaux, je pouvais bien être le plus sauvage des hommes.
T’arrives plus à lancer un Doloris ? T’as récupéré tes valeurs dans le caniveau après t’être fait sucer ou quoi ?
Du nerf, Alistair
.
La voix de mon vieux confrère mafieux résonna dans mon crâne, soulignant l’échec de mon sortilège contre un otage qui refusait de parler. Melville, mon alter-ego, s’en sortait mieux que moi, mais j’étais incapable de produire le sort car la chimie mentale n’opérait pas. C’est trop difficile, songeai-je, silencieux. Je m’éloignai de la victime, mon pas en arrière claquant sur le sol pour résonner dans mon crâne durant de longues secondes. Je …, soufflai-je, laissant la perplexité apparaître sur le visage de mon interlocuteur. Je suis crevé. Il y avait quelque chose qui m’était fondamentalement étranger dans ce type de torture et j’avais redouté qu’on m’ordonne de réaliser le maléfice, conscient que j’en étais incapable. Conscient qu’il fallait s’affranchir du moindre sentiment pour pouvoir goûter à ce pouvoir. Conscient que la drogue m’aiderait à ne plus avoir de remord, conscient que j’allais oublier plus vite lorsque j’allais réussir à le lancer.
Et, sans surprise, j’y étais parvenu. Et, sans surprise, j’avais noyé ma culpabilité entre deux stupéfiants car cette puissance était intolérable.
Mon corps n’était pas fait pour la supporter : j’avais compris que la haine donnait l’envie de faire souffrir, mais que seule l’indifférence pouvait en générer le plaisir, cœur sombre et électrique de ce sort impardonnable. Il portait bien son nom. Qu’en est-il de tes remords aujourd’hui, Eachan ? J’avais dû me pardonner entre deux fix d’héroïne, lorsque je m’étais retrouvé assez seul pour croire que ces taudis parisiens étaient mon purgatoire. Mais le passé me rattrapait en cette aube encore endormie sous une couverture astrale, badigeonnant mon esprit des images de mes victimes qui se secouaient sur le sol, à mes pieds, comme des épileptiques. Te souviens-tu de leur nom ? Non, évidemment. Les exercices de mémoire que Leviathan m’avait imposés lors de ma convalescence les avaient exclus car je voulais renaître en homme meilleur. Alors, à choisir, quelle justice me jugerait ? Celle qui admettait que je n’avais pas été dans mon état normal, qui plus est forcé par une instance politique supérieure ? Celle qui considérait que j’étais coupable de mes actes, consentis ou non ? Ou bien celle qui doutait, oscillant entre toutes les issues d’un labyrinthe dont on ne connaissait pas le chemin le moins douloureux car tous semblaient minés par la rancœur ? Tu peux choisir, car moi j’en ai perdu la raison. Le résultat était le même de toute façon : on se concentrait sur mon sort et non sur celui de ceux et celles que j’avais torturés, des années auparavant. « Tu ne sais pas de quoi tu parles. » crachai-je à son attention, mais mon corps s’était déjà mis en marche, ma baguette pointée dans sa direction.
On apprenait à des enfants à ne rien ressentir. A emmagasiner une douleur si vive qu’ils en perdraient la raison. A n’être que colère, que haine et qu’indifférence.
Tu crois que Leviathan ne saurait pas lancer un Doloris ? Tu te fous de qui ?
Le loup est la colère, l’homme est la haine et le Léviathan l’indifférence
Il pourrait le lancer à son miroir s’il le regardait encore
mais toi
toi
tu n’y arrives plus
tu es un échec même dans tes coups les plus bas

L’éclair écarlate rougeoya du bout de ma baguette et plongea le reste de la clairière dans les ténèbres lorsqu’il la traversa. Je touchai ma cible en apparence, reprenant mes esprits chargés de regret. Je ne voulais pas entendre l’écho de la formule sonner dans mon crâne comme la cloche annonçant mon enterrement, mais ma mémoire encore vive ne put l’empêcher d’entrer : Endoloris. Un nuage de poussière tournoyait à présent là où Leviathan s’était tenu quelques secondes plus tôt, le silence témoignant de l’inefficacité du sortilège. Puis, petit à petit, sa silhouette réapparut, droite et menaçante à travers le brouillard, ses yeux luisants dans la pénombre et me fixant d’un air terrible. Le tumulte qui rythmait les battements de mon cœur manqua de me faire trébucher et je fis un pas en arrière, conscient que tout était trop réel, tout était trop voulu. Je voyais son visage se découper progressivement dans les ténèbres, ne pouvant distinguer un sourire tant ses prunelles brûlaient de violence – n’était-ce pas la mienne que je voyais luire là où je voulais abandonner ma responsabilité ? Et je voulais lui crier :
regarde ce que tu m’as fait faire
tu n’attendais que ça
tu voulais le mériter pour souligner tes propos par des actes

Mais aucun son ne sortit de ma gorge sèche tandis que mes doigts se dépliaient lentement, laissant ma baguette tomber dans l’herbe. Ma mâchoire se relâcha à son tour, mes lèvres formant un mot que je ne sus prononcer. Ma rage s’était sublimée en douleur et mon corps se rendit naturellement vulnérable, conscient que l’envie ne suffisait pas, il fallait du plaisir, et pour cela j’aurais dû ne rien ressentir à l’égard de mon adversaire. Mais force était de constater que j’étais incapable de le faire souffrir.
Il ne me restait plus qu’à retomber et me cacher tel le lâche que j’avais toujours été.
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Ishikawa Ryuku
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MessageSujet: Re: am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan)   am i a prisoner to instincts or do my thoughts just live as free and detached as boats to the dock ? (leviathan/eachan) EmptyMer 25 Sep - 19:48

est-ce que tu connais le corps humain, Eachan?
est-ce que tu connais les os, les artères, les cavités?
est-ce que tu sais ce qui grandit et ce qui pourrit, lentement, inéxurablement?

Est-ce qu'il traçait ses côtes, les doigts se repliant dans la chair qui s'enfonçait lorsqu'il n'y avait plus d'os ni cartilages? Leviathan traçait chaque matin la structure de ses os, l'enfoncement de son torse au beau milieu de sa cage thoracique. Il observait son diaphragme se contracter à chaque inspiration et il voyait sa peau s'étendre dès qu'il relâchait son souffle, quelques secondes trop tard. Il passait ses doigts dans le troisième espace intercostale pour sentir son atrium droit battre à un rythme régulier, ultime marque qu'il vivait encore. Il enfonçait de plus en plus ses doigts, dans une tentative désespérée d'arracher un organe qu'il connaissait sans comprendre. Il avait étudié la composition du sang à l'entrée du coeur, la décomposition de l'organe en deux parties qui ne se valaient pas, les valves qui maîtrisaient les flux, le rythme imposé par le noeud sinusal. Mais le palpitant continuait de tambouriner dans sa poitrine, pour des raisons qu'il pouvait deviner mais qu'il ne pouvait pas contrôler. Et cela l'horrifiait parce qu'il avait beau affuté son esprit, son coeur restait le plus puissant, implacable maître de ses réactions et de ses pensées, bout de chair glorifié par un peuple mais exécré par un homme.
l'instinct de survie, l'instinct de respirer, encore et toujours, l'instinct de ne pas s'arracher les côtes
c'est de la merde tout ça, tu le sais non?
c'est une protection qui n'est pas assez efficace pour moi, Eachan
putain d'Aristote

Alors il étirait ses bras vers l'arrière et parcourait les vertèbres, les énumérant une par une. Son pouce s'élevait au dessus des autres doigts pour appuyer sur celles qui étaient appelées vertèbres cardiaques, sur celles qui étaient les moins mobiles puisqu'elles devaient protéger le coeur. Il voulait crier, parce que malgré toute son intelligence, il ne comprenait pas encore pourquoi il méritait autant de protection, ce coeur. Ce dernier se trouvait au milieu d'une forteresse, que Leviathan voulait détruire brique par brique, pour enfin observer ce qui se trouvait au milieu, dans un désespoir que des dizaines d'autopsie n'avaient pu épancher.
maintenant je le sais, Eachan
les côtes, les vertèbres, la graisse
toute une structure autour d'un pauvre organe
tout cela pour me protéger de toi

Le corps humain était fragile, et le médicomage ne le savait que trop bien. Il plongeait ses mains dans la chair et dans le sang, et ses manches retroussées étaient rouges, souillées à jamais par l’hémoglobine d’un être qu’il n’avait pu soigné. La magie était éphémère, un artifice comme un autre. Ses années d’étude des pathologies moldues l’avaient mené à se retrouver dans des situations où il avait fait mourir un patient parce que les moldus ne devaient pas découvrir la magie. Il n’était pas un dieu, Leviathan. Il était le monstre du chaos primitif, au corps recouvert d’écaille qu’il avait fusionné de ses propres mains. Il n’était qu’un prince des anges déchus dans une carapace humaine, celui qui voguait sur les nuées, l’albatros à jamais touché par les nuages pourris de la décadence humaine. Il était loin de tout cela, et pourtant le regard d’Eachan arrivait à le toucher, à le destituer de son trône d’argent dont la base était rongé par les bois de la forêt qui l’entourait. Il vacillait, son siège, son petit monde sur lequel il régnait, et il montrait les crocs, ultime défense de l’animal parce que l’humain devenait inutile. Alors, il se réfugiait dans le seul rempart qui lui restait, insignifiantes pierres d’un édifice déjà dénaturée. La vérité.
la vérité
est que tu me colles toutes les étiquettes que tu détestes
est que tu me détestes pour oublier à quel point tu as essayé de te détruite, une piqure après une autre
est que tu me trouves faible
est que je te trouve faible
est qu’il ne te reste que la violence
la force du faible
de celui à qui les mots se taisent

Leviathan n’avait jamais eu la faiblesse qu’il reconnaissait en Eachan. Celle de s’effondrer dans un remède artificiel, cacher ses défauts dans les creux d’un coude et de se laisser aller à la dépendance chimique. Lui avait continué. Il avait serré les dents, il avait articulé son monde autour des défauts que les autres lui trouvaient, il les avait exposé lors des galeries, en avait fait des chefs d’oeuvres. Le charisme débordait de ses plaies infectées, et le pus était ce qu’il récoltait dans ses mains abimés par les centaines de gants qu’il avait enfilé. Le cuir lancinait sa peau et le latex le brûlait, mais ce n’était rien par rapport à la blessure de regards condescendants des autres sur ses agissements, tout simplement parce qu’ils ne comprenaient pas.
la vérité est que pygmalion n’avait jamais réussi à réveiller galatée
voilà ce qui arrive à la fin de l’histoire eachan
oublié l’insouciance, oublié l’ignorance
dis bonjour à la violence
à la colère, à la haine, à l’indifférence
à la réponse d’un homme bafoué,
au visage meurtri de rouge

Parce que la lune était encore pleine dans son sein, et que son sang était encore rempli par les effluves de la forêt et de la bête qu’il avait dévoré, il ne fallut qu’un pas sur le côté pour éviter le sort rouge qui allait frapper un arbre derrière lui. Alors que son corps vibrait d’une violence qu’il n’avait jamais rencontré avant de devenir pleinement animal, son esprit était celui de l’humain qui faisait brûler les peuples, le génie qui plongeait ses mains dans les thorax ouverts pour trouver la preuve qu’il était comme les autres.
Parce qu’il était Leviathan Faust et que la magie ne s’arrêtait pas devant lui, il leva à son tour sa baguette, dont l’énergie était encore malvenue dans ses muscles. Ses lèvres murmurèrent un son que personne n’autre ne connaissait, sa gorge se dépliant pour accepter le sort qu’il avait crée, puisant dans la ressource infinie de son intelligence pour créer une chimère qui ne révolutionnerait que sa propre image de soi.
parce que soigner et blesser n’est que la même chose
parce que tu ne m’as jamais demandé si, moi, j’y arrivais à blesser les autres
parce que blesser les uns est plus facile que se blesser soi même
et tu devrais savoir que c’est mon plus grand talent

Le sort fusa en la direction d’Eachan, et Leviathan observa le fil doré qui se propageait dans l’air, ne subissant aucune des lois de la physique qu’il connaissait pourtant par coeur. La magie était autre, entité secrète d’un monde reculé, au bord de la mort. Son esprit reconnaissait chaque particule qui se trouvait dans la traversée morbide d’un sort dont il connaissait les conséquences, mais qu’il n’arrivait pas à envisager. Mais il l’avait envoyé, avait manipulé son puit de magie interne pour former les complexes symboles qu’il utilisait mentalement pour créer le sort. Il voulait qu’Eachan souffre, parce que ses propres mots lui manquaient, et qu’il venait de voir qu’il n’était pas le seul à faire souffrir l’autre. Il avait cru qu’Eachan serait capable de voir plus loin, de soulever un masque sans ébranler l’entière construction, mais l’écossais était aussi égoïste que celui à qui il reprochait son indifférence. Il voulait tout, Eachan. Il voulait tout voir, tout connaître, pour se mettre au niveau de l’homme qui voyait trop. Il voulait tirer sur la corde qui dépassait et voir enfin l’édifice s’écrouler, ne laissant que ruine à la fin. Il voulait ruiner l’homme qu’était Leviathan dans la simple idée de le comprendre, comme s’il n’était qu’un être comme les autres. Il voulait arracher les tissus trop marqués qui le recouvraient de peur de montrer ce qu’il y avait en dessus. Voulait-il de Leviathan ou d’une pale copie, à l’apparence conforme mais à l’esprit dénudé de toute sécurité? L’automate sans vie, à l’âme dérobée par des trop nombreux vols d’identité. Alors Leviathan souffrait, parce qu’il ne savait pas ce qu’Eachan attendait de lui, mais c’était trop, toujours trop.  
c’est si grave, dis, d’avoir mal?
parce que j’ai mal tout le temps,
mais personne n’a envie de le savoir
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